Grève Générale Féministe
Du début à la fin de nos carrières nous sommes confrontées à des injustices :
payées 24% de moins, avec départs plus tardifs à la retraite, retraites qui sont moins élevées, nous sommes les premières touchées par la loi retraite de 2023. [1]
38.5% des femmes ont été victimes de comportements sexistes et sexuels au moins une fois dans leur vie professionnelle, dont 15,2 % dans le cadre de leur emploi actuel.[2]
Aujourd’hui nous sommes obligées de constater que les agresseurs sont soutenus et protégés par les entreprises [3], ce qui contribue à une ambiance sexiste au travail. Ça augmente notre taux de départ du secteur : en effet au bout de 10 ans de carrière, 41 % des femmes abandonnent le secteur (contre 17 % chez les hommes) [4].
77% des Français·es considèrent que les femmes et les hommes ne sont pas traité·es de la même manière dans le monde du travail[5]. Ce rapport du Haut conseil à l’égalité sur le sexisme nous alerte aussi sur un risque de régression des droits des femmes.
Le lieu de travail est normé pour les hommes : température « idéale » de travail
Ces inégalités, ces injustices et ces violences systémiques sont constitutives du fonctionnement de notre société, et s’expriment avec force dans le monde du travail. C’est pourquoi nous nous mobilisons dans nos entreprises, dans nos bureaux, dans la rue pour exiger :
La fin des inégalités salariales
Un congé hormonal [6]
Le droit constitutionnel à l’avortement avec moyens
Congé parental mieux rémunéré et qui incite un réel partage entre conjoint-es
Suivi régulier des violences sexistes et sexuelles en entreprise grâce à l’introduction VSS dans le DUERP
La fin du harcèlement sexuel et moral institutionnalisé dans le domaine du numérique et du jeu vidéo en particulier. Nous exigeons des sanctions disciplinaires et judiciaires pour les harceleurs de Ubisoft et leur complices au sein des services RHs qui les ont couvert durant des années.[7]
Congés hormonaux
Nos réflexions à Solidaires Informatique, les discussions avec d’autres structures de l’Union, et les travaux de Annabel B. [9], ergonome et psychologue du travail, nous ont permis d’étayer les revendications de notre syndicat sur le congé de cycle hormonal.
Le bien-être au travail, ce n’est pas avoir « un petit peu mal », ni devoir utiliser des stratégies de dissimulation de notre état physiologique. Les conséquences psycho-cognitives de la vie hormonale et procréative, particulièrement l’injonction à cacher son état, exposent à des risques spécifiques, notamment sanitaires, mais pas seulement. Dissimuler, et surtout dissimuler son état physiologique, est extrêmement coûteux au niveau émotionnel et cognitif. Les femmes et minorités de genres font plus d’épisodes dépressifs, anxieux ou d’épuisement au travail que les hommes cis. Les conséquences psycho-cognitives de l’injonction à cacher leur état sont en elles-mêmes des facteurs de risque physique et psychique.
Pourtant, à ce jour, les entreprises françaises et le législateur ont très peu investi le sujet alors que 66% des salarié·es en France se disent favorables à l’instauration d’un tel dispositif.[10]
Nous revendiquons des jours de congés maladie sans certificat, au moins 26 par an, dans la limite de trois jours consécutifs. Ces jours de congés doivent être attribués sans discrimination de genre, accessibles à tous·tes. [11]
Travailleur’euses du sexe
Solidaires Informatique milite pour l’abandon des lois pénalisant le travail du sexe qui précarisent et mettent en danger les personnes concernées.[12]
La définition légale très large du proxénétisme incluant toute personne pouvant aider les travailleur’euses du sexe dans leur travail pose problème. Elle amalgame les personnes qui exploitent les TDS — avec ou sans violence, en les rémunérant ou non — avec les partenaires de vie qui permettraient l’utilisation de matériel ou de locaux, la famille ou les ami·es qui prêteraient de l’argent, les « agent·es », « secrétaires », « videur·euses », les gérant·es d’hôtellerie et surtout les autres TDS qui voudraient s’entraider. La lutte contre le proxénétisme est utilisée comme prétexte pour s’attaquer à toute forme de solidarité et auto organisation des TDS.
Selon cette définition, deux TDS qui possèdent une camionnette en commun pour exercer leur profession sont proxénètes l’une de l’autre. Les propriétaires bailleurs sont proxénètes et sont donc en droit de mettre fin au bail à tout moment, y compris pendant la trêve hivernale. Les banques et autres entreprises de services sont également considérées comme des proxénètes ce qui prive les TDS de bon nombre de services.
Le “proxénétisme d’entremise” — l’interdiction de la mise en relation — concerne aussi les hébergeurs de sites web. Le patron de la brigade de répression du proxénétisme a exprimé que la fermeture de Vivastreet (un site d’annonces) n’a pas favorisé la lutte contre l’exploitation⁴ puisque ce site étant hébergé en France, il collaborait avec la police afin de les aider à identifier des cas d’abus, dont ceux de traite des êtres humains, ou d’exploitation de mineur·e·s, ce qui n’est pas le cas des sites d’annonces hébergés à l’étranger.
Par ailleurs, dans ce contexte l’exploitation est en réalité favorisée, puisque certains annonceurs justifient leurs pratiques de censure par les risques judiciaires qu’ils encourent. Enfin, la modération accrue des plateformes suite à la loi Avia entraîne un retrait des comptes des TDS des réseaux sociaux même lorsqu’ils ne servent pas à les mettre en relation avec des clients. [13][14][15]
Égalité professionnelle
Plus de 50 ans après la première loi française en la matière, l’égalité professionnelle entre les femmes et hommes est loin d’être acquise. La domination patriarcale continue de s’exercer dans les sphères professionnelle, sociale et intime, où le travail productif et reproductif des femmes est à la fois moins valorisé et moins bien rémunéré.
La division du travail domestique reste très inégalitaire : les femmes passent plus de temps que les hommes au travail domestique dans des proportions similaires à celles des années 1980, et en réalisent les aspects les plus répétitifs, tels que le ménage, le suivi des devoirs des enfants, ou la préparation des repas [16]. Au moment de l’arrivée d’un enfant, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à ajuster leur temps de travail. 24 % des nouvelles mères passent à temps partiel, contre seulement 2 % des pères [17].
Ces inégalités systémiques freinent les possibilités qu’ont les femmes d’accéder à un emploi, d’évoluer dans leur carrière, et d’accéder à une augmentation salariale, voire simplement de les maintenir. Alors que la naissance du premier enfant n’a pas d’impact salarial sur les hommes, les femmes voient leur salaire total chuter de 40 % l’année de la naissance puis vivent une pénalité durable de l’ordre de 30 % du salaire [18]. En 2021, l’écart de salaire entre hommes et femmes était de 24,4 % tous temps de travail confondus, et de 15,5 % à temps de travail égal [19].
N’attendons pas 50 ans de plus pour atteindre l’égalité professionnelle ! Nous revendiquons, dans toutes les entreprises :
La négociation d’un accord d’égalité professionnelle et la publication d’un rapport de situation comparée présentant des indicateurs genrés sur les embauches, promotions, rémunérations, congés liés à la parentalité, arrêts de travail, etc. ;
L’application de mesures concrètes pour diminuer les écarts structurels de salaire entre femmes et hommes ;
La prise en compte de la situation de parentalité pour les horaires de travail, l’attribution de congés et de temps partiel choisi avec priorité aux familles monoparentales ;
La rémunération complète des congés de maternité et paternité, d’adoption et d’accueil de l’enfant ;
Le rattrapage salarial intégral dès le retour dans l’entreprise de salarié·es après un congé de maternité, paternité, d’adoption ou parental, en attribuant un montant fixe correspondant à la médiane des augmentations accordées à toustes les salarié·es ;
La même progression de carrière pour les femmes que pour les hommes ;
L’obligation de suivi d’une formation sur l’égalité femmes-hommes pour tous·tes les salarié·es.
Contre l’extrême-droite, féministes antifascistes !
L’extrême-droite gagne du terrain partout dans le monde. Trump aux États-Unis, Milei en Argentine, Poutine en Russie, Meloni en Europe, ou bien encore l’ancrage de plus en plus marqué du RN à l’Assemblée Nationale et dans les médias. Au-delà des seules organisations marquées à l’extrême-droite, ce sont les idées d’extrême-droite qui se répandent, dans les médias, dans nos gouvernements successifs mais aussi sur nos lieux de travail . Mais avant comme maintenant, l’extrême-droite est l’ennemie des femmes et des minorités de genre !
D’une main, l’extrême-droite instrumentalise le féminisme au service d’un projet raciste. De l’autre, elle attaque nos droits, à commencer par l’accès à l’IVG.
Ces attaques ciblent particulièrement les femmes les plus vulnérables.
Les femmes trans par exemple, subissent la multiplication des discours, des lois et des décrets transphobes, notamment aux États-Unis depuis l’accession au pouvoir de Donald Trump. Ces mesures empêche des milliers de personnes trans d’accéder à des soins essentiels, les empêche de quitter le territoire américain, et libère les discours, les discriminations et les actes transphobes partout dans le pays.
De la même manière, les femmes racisées sont en première ligne des attaques de l’extrême-droite, comme on a pu le voir par exemple avec le retour de la ritournelle raciste et islamophobe sur les accompagnatrices scolaires portant le voile par le ministre de l’intérieur Bruno Retailleau.
Ces attaques sont un point d’entrée pour le contrôle des corps. Les femmes, essentialisées, serviraient à produire et entretenir des travailleurs (maternité, éducation…) pour maintenir une société d’exploitation capitaliste, raciale et patriarcale.
Ces attaques ont aussi des répercussions au travail : aux États-Unis, les multinationales, auparavant adeptes des discours progressistes et inclusifs, ont bien vite changé leur politique interne pour s’aligner sur les demandes de Trump. Ainsi c’est la fin des politiques de diversité et d’inclusion chez Accenture, et cela se répercute dans leurs filiales partout dans le monde, notamment en France.
Syndicalistes, féministes et antifascistes, nous pensons que le travail est un des premiers espaces pour combattre les idées d’extrême-droite en montrant leur imposture. C’est là qu’on peut se défendre entre travailleur·euses, et montrer que nos intérêts communs, c’est le combat contre les idées et mesures racistes, sexistes et lgbtphobes. Le patronat nous divise et nous isole pour mieux nous asservir, alors nous faisons bloc ensemble !
Comme la section Octo de notre syndicat a pu le faire, exigeons par exemple de nos employeurs qu’ils prennent position publiquement sur le bien être et la non-discrimination des salarié·es, pour assurer notre sécurité et protéger notre santé physique et mentale, comme l’impose le code du travail. [20] [21]
[3] https://solidairesinformatique.org/wp-content/uploads/2021/07/DepotPlainte.pdf
[4] https://solidairesinformatique.org/2022/03/20/8-mars/
[5] https://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/IMG/pdf/barome_tre_sexisme_2024_-_viavoice_pour_le_hce.pdf
[6] https://blogs.mediapart.fr/annabel-b/blog/090423/le-conge-de-cycle-hormonal-est-ce-super-flux
[7] https://solidairesinformatique.org/2024/02/16/ubisoft-devant-la-justice/
[8] https://solidairesinformatique.org/2022/04/24/contre-le-sexisme-riposte-systematique/
[9] https://blogs.mediapart.fr/annabel-b/blog/090423/le-conge-de-cycle-hormonal-est-ce-super-flux
[11] https://solidairesinformatique.org/2024/12/18/jours-de-conges-hormonaux-sans-certificat/
[13] https://www.medecinsdumonde.org/app/uploads/2023/04/Shadow-Report-2020.pdf
[14] https://parapluierouge.org/node/42
[15] https://parapluierouge.org/node/52
[16] https://www.inegalites.fr/que-faire-partage-taches-menageres
[18] https://www.insee.fr/fr/statistiques/4253041?sommaire=4253159
[19] https://inegalites.fr/femmes-hommes-salaires-inegalites
[20] https://solidaires-octo.com/post/sunset-de-la-diversite-rise-up-des-luttes/
[21] https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000035640828/2024-01-15